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Lettre ouverte à Mme la Conseillere fédérale Widmer Schlumpf et à M. le Conseiller d’Etat Leuba

par | 1 mars 2010 | Communiqués de presse

 

Madame la Conseillère fédérale, Monsieur le Conseiller d’Etat,

La Ligue suisse des droits de l’Homme et la Coordination Asile Vaud tiennent à dénoncer la situation de M. Pitchou K., menacé de séparation avec sa famille en raison d’un renvoi imminent par vol spécial dans son pays d’origine, et le soutient dans sa volonté légitime de rester en Suisse.

M. Pitchou K. est originaire de Kinshasa, au Congo, et est arrivé en Suisse il y a 12 ans. Il s’est établi à Lausanne, où il a suivi une formation professionnelle de coiffeur et a développé de nombreuses relations amicales. Durant son séjour en Suisse, il a fait la connaissance de Mlle Merveille M., également originaire du Congo et résidente en Suisse au bénéfice d’un permis F, avec laquelle il vit une relation amoureuse. Le couple a eu un enfant né le 11 septembre 2009.

A son arrivée en Suisse, M. Pitchou K. a d’abord obtenu un permis F, puis a adressé une demande d’asile à l’Office fédéral des migrations (ODM), qui lui a été refusée le 8 février 1999. Son lieu de séjour a, par la suite, toujours été connu par le contrôle des habitants. Durant ces 12 années passées en Suisse, M. Pitchou K s’est intégré de façon exemplaire.

Le 26 octobre 2009, M. Pitchou K. est arrêté pour séjour illégal en Suisse et, sur ordonnance du Juge de paix, est envoyé à l’établissement de détention administrative de Frambois en vue de son expulsion du territoire, malgré les 12 ans qu’il a passés en Suisse et l’existence d’un vrai projet de vie dans ce pays.

Le 1er décembre 2009, M. Pitchou K. obtient un acte de reconnaissance de paternité de son enfant auprès de l’Office de l’Etat civil de la ville de Vevey puis entame avec Mlle Merveille M. une procédure de mariage, qui est actuellement en cours. Malgré ces démarches, le Service de la Population du canton de Vaud (SPOP) estime qu’une véritable unité familiale n’a pas été prouvée, et que, par conséquence, rien ne s’oppose à l’expulsion de M. Pitchou K. par un vol spécial pour le Congo prévue prochainement. Le SPOP se réfère en l’espèce à la jurisprudence du Tribunal fédéral qui dispose que le renvoi n’est suspendu que lorsqu’un mariage apparaît sérieusement voulu et imminent, soit lorsque la procédure préparatoire est close et qu’une date a été fixée pour la cérémonie.

M. Pitchou K. se trouve alors engagé dans une course contre la montre afin de réunir les documents requis pour sa démarche de mariage et obtenir la validation de l’Office d’Etat civil, la bonne foi de ses sentiments et de ses projets de vie familiaux ne recevant pas le crédit nécessaire auprès de l’administration du SPOP pour annuler la procédure d’expulsion.

La Ligue suisse des droits de l’Homme et la Coordination Asile Vaud, prenne position en faveur de M. Pitchou K. et en appelle au respect de la vie familiale selon l’art. 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Il en va d’un strict respect par la Suisse de ses obligations constitutionnelles et internationales, dont découle le droit des membres d’une famille de ne pas être séparés et de fonder une famille.

La Ligue suisse des droits de l’Homme et la Coordination Asile Vaud regrettent que l’administration du SPOP ne fasse preuve d’un jugement plus circonstancié. En l’occurrence, le fait est que l’officialisation de la démarche de mariage demeure l’unique élément pour satisfaire aux critères légaux de suspension du renvoi, ne dépendant, de surcroît, plus des principaux intéressés. Maintenir l’expulsion de M. Pitchou K. au motif que son mariage n’apparaît pas comme sérieusement voulu et imminent nous apparaît alors comme disproportionné.

De plus, il conviendrait de prendre en considération l’importance de la présence paternelle dans l’intérêt supérieur de l’enfant de M. Pitchou K. selon l’art. 3 de la Convention relative aux droits de l’Enfant (CDE), qui comprend l’engagement des Etats parties à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être.

Par conséquent, la Ligue suisse des droits de l’Homme et la Coordination Asile Vaud incitent vivement l’administration du SPOP à reconsidérer la situation de M. Pitchou K. aux vues des normes du droit international et européen afin de prévenir une action de l’Etat, qui, à défaut du respect de celles-ci, apparaîtrait plus comme un agent de décomposition de la famille qu’un garant de l’état de droit.

Dans l’attente d’une action de votre part, veuillez agréer, Madame la Conseillère fédérale, Monsieur le Conseiller d’Etat, nos salutations respectueuses.

 

LIGUE SUISSE DES DROITS DE L’HOMME – Genève
COORDINATION ASILE VAUD