Une lettre ouverte appelant à voter NON à l’augmentation de la subvention fédérale à l’Agence de garde-côtes et garde-frontières Frontex a été signée par plus de dix organisations actives dans le domaine de la migration et des droits humains en Suisse, dont la Ligue suisse des droits de l’homme (Droit de rester Neuchâtel, droitsfondamentaux.ch, Comité genevois contre Frontex , NoFrontex Referendum, Solinetz Zürich, Stop Exclusion Genève, etc.) et trente parlementaires fédéraux, cantonaux et communaux.
Nous constatons que le Conseil fédéral et les milieux économiques ont accrédité, à grands renforts de publicité, la thèse très contestable d »une sortie de l’espace Schengen en cas de non le 15 mai prochain. Nous répondons ici dans le détail à ces faux arguments. Cette votation représente un enjeu majeur pour les droits des migrant·e·s en Suisse et en Europe.
Frontex est l’Agence de garde-frontières et de garde-côtes de l’Union européenne. Elle a été fondée en 2005. Depuis lors, son budget a augmenté de 7000 %, passant de 6 millions à 11 milliards d’euros pour la période 2021-2027. Le 15 mai prochain, la population suisse doit décider s’il est nécessaire d’augmenter le financement suisse à Frontex de quelque 24 à 61 millions de francs.
Le Conseil fédéral, les milieux économiques et une partie de la presse à grand tirage tentent d’accréditer la thèse selon laquelle la Suisse serait exclue de l’accord d’association à l’espace Schengen en cas de non le 15 mai prochain. Or, loin d’entraîner une telle conséquence, un rejet permettrait simplement au Parlement suisse de reprendre la main sur ce dossier afin de proposer une loi plus respectueuse des droits humains. En effet, la Suisse peut tout à fait assortir la participation suisse à cette agence de conditions. Et ce d’autant plus que les revendications des référendaires sont largement partagées par les parlementaires européens, tous bords confondus. Par ailleurs, aucun gouvernant européen ne menace aujourd’hui la Suisse de telles conséquences parce que l’Union européenne n’a pas intérêt à voir la Suisse, au cœur du continent, sortir de Schengen qui est, rappelons-le, un outil de coopération sécuritaire réciproque.
Non, la question que posent les référendaires est très simple. Il s’agit de décider si l’agence Frontex, telle qu’elle fonctionne encore aujourd’hui, est compatible avec notre obligation d’offrir une politique d’asile digne et humaine aux personnes fuyant la persécution.
La réponse, pour nous, est clairement non. Au lieu de protéger les demandeurs d’asile à leur arrivée et de les aiguiller dans les filières prévues à cet effet, Frontex participe directement ou indirectement à des renvois illégaux et à des atteintes aux droits humains en contradiction avec nos valeurs humanistes et le droit international.
La violation par cette agence des droits fondamentaux des migrants en Grèce a été par exemple largement dénoncée par les ONG. Il en va de même des opérations de renvoi de migrants par la Hongrie, en dépit d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui les juge incompatibles avec le droit européen. Beaucoup d’opérations connues sous le nom de « prévention au départ » sont en fait des refoulements illégaux vers des pays comme la Libye accusés de traite, tortures et emprisonnements arbitraires.
Les témoignages et rapports faisant état de pratiques totalement inadaptées, de violences ainsi que de traitements illégaux et dégradants infligés aux migrants, se multiplient.
L’Office européen de lutte antifraude a mis en évidence des actes de harcèlement, de mauvaise conduite ainsi que la lenteur de recrutement des officiers de protection pourtant tellement indispensables. Le parlement européen, comme les référendaires en Suisse, est très préoccupé par cette situation.
C’est pourquoi, il pris la décision de geler 12% du budget de l’institution.
La situation est tellement chaotique au sein de cette agence que le directeur exécutif de l’agence, Fabrice Legeri, a fini par donner sa démission, au grand soulagement des responsables européens. Car outre les pratiques illégales, le fonctionnement de cette agence ne répond plus depuis longtemps aux règles minimales de bonne gouvernance.
Voter NON à l’augmentation de la participation suisse à Frontex ce n’est pas s’exclure de l’Union européenne mais au contraire participer activement au débat européen sur la façon dont nous entendons accompagner les flux migratoires.
Nous estimons que le droit pour une personne persécutée de déposer une demande d’asile dans nos pays doit être pleinement garanti. Construire une forteresse autour de l’Europe sans assurer de filière officielle de dépôt de demande d’asile, par exemple au travers notre réseau d’ambassades, n’est pas acceptable et met en péril nos valeurs ainsi que le droit international. La mission prioritaire de Frontex est de protéger les frontières du continent contre le trafic et le crime, y compris en col blanc. Sa mission ne doit pas être de bloquer l’arrivée de demandeurs d’asile en mettant la vie de personnes cherchant refuge en danger. Nous demandons que Frontex se conforme, dans son fonctionnement, au principe selon lequel tout individu cherchant protection puisse soumettre une demande d’asile sur notre sol.
Il en va de nos valeurs en tant que démocraties, respectueuses des droits fondamentaux et de l’Etat de droit. Il en va aussi de notre cohérence face au droit international qui doit être défendu autant en Ukraine qu’en Suisse.
Votons massivement non à l’augmentation du financement de Frontex !
Signataires :
- droitsfondamentaux.ch,
- Droit de Rester Neuchâtel,
- Forum civique,
- NoFrontex Referendum,
- Solinetz Zürich,
- Les VERT-E-S Section Jura,
- Sibel Arslan (Conseillère nationale, BS, les Vert.e.s),
- Gabriel Barta (Mitglied der Kommission Migration und InternationalesGenève, SP),
- Élisabeth Baume-Schneider, Conseillère aux Etats (Jura, PS),
- Samuel Bendahan (Conseiller national, VD),
- Brigitte Berthouzoz (Membre du comité, Ligue suisse des droits de l’homme, Genève),
- Philippe Borgeaud (Professeur honoraire, Université de Genève),
- Apyio Brändle-Amolo (Conseiller communal, Schlieren, SP),
- Florence Brenzikoger, (Conseillère nationale, BL, Grüene),
- Thomas Bruchez (Vice-président de la Jeunesse socialiste suisse),
- Oriana Bruecker, Conseillère municipale, Ville de Genève, SP),
- Maryelle Budry (Conseillère municipale, Ensemble à Gauche, GE),
- Marie-Claire Calloz-Tschopp (Collège internationale de Philosophie, Genève),
- Carine Carvalho Arruda (Députée au Grand Conseil vaudois),
- Cathy Day (Co-présidente Ligue suisse des droits de l’homme),
- Christophe Clivaz (Conseiller national, Les Verts, VS),
- Giada de Coulon, (Comptoir des médias, Vivre Ensemble),
- Graziella de Coulon (Collectif Droit de Rester Lausanne),
- Brigitte Crottaz (Conseillère nationale, VD, PS),
- Christian Dandrès (Conseiller national,Genève, SP),
- Emmanuel Deonna (Grossrat,Genève, SP),
- Marianne Ebel (Présidente, Marche mondiale des femmes, Suisse),
- Pierre Eckert (Député, GE, Les Verts),
- Kurt Eger (Conseiller national TG, Grüene),
- Ricardo Espinosa (Directeur IAHRA, Genève),
- Laurence Fehlmann Rielle (Conseillère nationale, GE, PS),
- Pierre-Alain Fridez (Conseiller national, Jura, PS),
- Anna Gabriel Sabate (Secrétaire régionale Unia Genève),
- Wahba Ghaly (Conseiller municipal, Vernier, SP),
- Yan Giroud (Co-président Ligue suisse des droits de l’homme),
- Balthasar Glaettli (Conseiller national, ZH, Grüene),
- Sophie Guignard (Secrétaire générale de Solidarités sans frontières),
- Christian Huber (Präsident GRÜNE Stadt und Region St.Gallen),
- Baptiste Hurni (Conseiller national, NE, Les Verts),
- Ronja Jansen (Présidente, Jeunesse socialiste suisse),
- Delphine Klopfenstein-Brogini (Conseillère nationale, Les Vert·e·s, GE),
- José Lilo (Auteur, acteur & metteur en scène),
- Raphaël Mahaim (Conseiller national, Vaud, Les Vert·e·s),
- Sophie Malka (Comité de Vivre Ensemble),
- Ada Marra, (Conseillère nationale, VD, PS),
- Aude Martenot (Députée, Ensemble à Gauche, GE),
- Samira Marti (Conseillère nationale, BS, SP),
- Lisa Mazzone (Conseillère aux Etats, Les Vert·e·s, GE),
- Jean-Marie Mellana, (Comité PS VIlle de Genève),
- Sophie Michaud Gigon (Conseillère nationale, PS, VD),
- Marc Morel (Membre du comité central, Ligue suisse des droits de l’homme),
- Nicolas Morel (militant PS, Lausanne),
- Ilias Panchard (Conseiller communal, Lausanne, Les Verts),
- Isabelle Paquier-Eichenberger, (Conseillère nationale, GE, Les Vert·e·s),
- Alexis Patino, (Groupe Migration UNIA Genève),
- Kaya Pawlowska (Projektbeauftragte, SP Schweiz),
- Valerie Piller-Carrard (Conseillère nationale, Fribourg, PS),
- Katharina Prelicz-Huber (Conseillère nationale ZH, Grüene),
- Stéfanie Prezioso, (Conseillère nationale, GE, Ensemble à Gauche),
- Denis de la Reussille (Conseiller national, NE, Parti ouvrier Populaire/Parti du Travail),
- Jérôme Richer (auteur et metteur en scène),
- Jean-Charles Rielle (Député au Grand Conseil, GE, PS),
- Carol Scheller (Comité unitaire No Frontex, GE),
- Marionna Schlatter (Conseillère nationale, ZH, Grüene),
- Tobia Schnebli (Präsident der Partei der Arbeit,Genève),
- Mireille Senn (militante syndicale et des droits humains),
- Carlo Sommaruga (Conseiller aux Etats (PS, GE),
- Florio Togni (Président, Stop Exclusion, GE),
- Michael Töngi, (Conseiller national, Grüene, LU),
- Helena Verissimo de Freitas (Secrétaire régionale adjointe Unia Genève),
- Nina Vladović, (Präsidentin Migrationskommission VPOD),
- Nicolas Walder (Conseiller national,Genève, SP),
- Felix Wettstein (Conseiller national GRÜNE Solothurn),
- Alexandre Winter (Pasteur de l’église protestante de Genève),
- Samson Yemane (Conseiller communal, Lausanne),
- Jean Ziegler (anc.conseiller national,Genève)